Faits et perspectives

Femmes noires et épidémie d'épuisement professionnel : Prendre soin de soi et des autres a un coût (1ère partie)

4 novembre 2021
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Noires. Dépassées. Surchargées. Brisées. Quatre mots que les femmes africaines, caribéennes ou noires (ACN) connaissent bien à un moment ou à un autre de leur vie. Pourquoi ? Parce que je sais, étant une femme noire avec un vécu de quelques années, qu'être une femme noire n'est pas une expérience comme les autres. être une femme noire, c'est se débattre constamment pour trouver l'équilibre entre toutes les étiquettes sociales que l'on nous colle (nous sommes prévenantes, fortes, attentionnées, invincibles !) et le fait que nous n'avons ni soutien ni repos et que nous sommes usées jusqu'à l'épuisement. Souvent, on a littéralement l'impression que le poids et le bien-être du monde reposent sur nos épaules, au détriment de notre propre bien-être.

Face à l'incertitude et au stress liés à la pandémie mondiale, nous pouvons tous nous identifier à cette situation : le sentiment d'être physiquement, émotionnellement et mentalement épuisé, et de donner tout ce que nous pouvons, pour ne recevoir (ce qui semble n'être) que peu de reconnaissance en retour. Les changements constants, la nécessité de s'adapter continuellement, le fait d'être constamment entre deux situations (instables) et le bouleversement de ce que nous considérons comme "normal" ont sans aucun doute eu des répercussions sur chacun d'entre nous. Il existe un mot pour désigner ce sentiment : l'épuisement professionnel.

Ce "nouveau" phénomène qui se caractérise par un sentiment intense d'épuisement de son énergie dans tous les aspects de notre santé est devenu monnaie courante. Un sentiment que nous connaissons toutes et tous bien et dans lequel il semble n'y avoir plus aucune frontière entre la vie professionnelle et la vie personnelle, surtout pour les travailleurs de première ligne.

Mais est-ce vraiment un phénomène nouveau ? Pour certains et certaines, peut-être. Pour les femmes ACN, certainement pas.

Alors, qu'est-ce que l'épuisement professionnel ?

Selon un article rédigé par l'organisation Calmer, l'épuisement professionnel est "l'état d'esprit qui découle d'un stress non résolu à long terme et qui peut avoir des répercussions négatives sur votre travail et votre vie." La Mayo Clinic indique également que certaines causes potentielles de l'épuisement professionnel comprennent le manque de contrôle, des attentes professionnelles peu claires, une dynamique de travail dysfonctionnelle, un manque de soutien social et un déséquilibre entre le travail et la vie personnelle.

L'épuisement professionnel vous laisse un sentiment d'improductivité, de désespoir, d'impuissance, de ressentiment et de cynisme. Concrètement, il survient lorsque vous atteignez un état dans lequel vous sentez que vous n'avez plus rien à donner. Il existe cinq étapes couramment observées qui mènent à l'épuisement professionnel: la phase de lune de miel, le début du stress, le stade du stress chronique, le début de l'épuisement professionnel et l'épuisement professionnel complet.

Écouter les expériences de femmes ACN face à
l'épuisement professionnel : l'étude Because She Cares

Au cours des deux derniers mois, j'ai eu accès à une étude et un groupe de femmes ACN qui avaient des échanges sur ce même sujet. Elles ont parlé de leur emploi dans le secteur du VIH/SIDA et de sujets similaires tels que l'épuisement professionnel, le stress, le manque de soutien organisationnel, la précarité de l'emploi, les salaires injustes, le racisme anti-Noir et l'usure mentale et physique du corps qui en découle. Ces discussions plus larges faisaient partie d'une étude et d'un projet de mobilisation et d'application des connaissances basé sur les arts, appelé Because She Cares (BSC).

Il n'est pas toujours facile de trouver un équilibre entre les nombreuses facettes des missions de prestations de soins. Les narratrices ont parlé des difficultés de prendre soin d'elles-mêmes et des autres. Trop souvent, elles font passer les besoins des autres - famille, communauté - avant les leurs.
-Lori Chambers

Fondé par Lori A. Chambers, le projet BSC a débuté comme un projet de recherche qualitative pour son doctorat en travail social. S'écartant des méthodes "traditionnelles" de collecte de données, Lori a utilisé des méthodes orales et de performances artistiques fondées sur des visions du monde africaines pour partager les histoires de femmes africaines vivant avec le VIH (alias les "narratrices") et employées dans des organismes canadiens de lutte contre le sida (OLS).

BSC a souligné que l'épuisement professionnel était apparemment quelque chose qui "vient avec les caractéristiques de l'activité" : travailler dans la prestation de soins en tant que femme ACN. Les soins constants associés au manque de soutien de leurs organisations et d'autres personnes font que ces femmes ne sont pas en mesure de prendre soin d'elles-mêmes. Essentiellement, la possibilité de prendre soin de soi était minimale ou même inexistante pour beaucoup de narratrices du projet BSC parce qu'il n'y avait tout simplement pas de temps disponible pour cela.

Dans la prochaine partie de cette série de billets de blogue, je partagerai mes expériences personnelles d'épuisement en tant que femme ACN, mais pour l'instant, je terminerai par cette citation de Rachel Ricketts : " Nous sommes épuisées, non seulement par le contexte actuel, mais aussi par la misogynie et le racisme anti-Noirs constants et quotidiens que nous subissons... Par la perspective que nous devons et allons travailler jusqu’à l’extrême limite, si ce n’est pas jusqu’à la tombe, afin de sauver le pays et le monde d’eux-mêmes. Sans reconnaissance ni soutien."

Je me reconnaîs moi-même et je reconnaîs mes expériences dans cette citation, et à mon avis, elle résume assez bien les expériences des femmes ACN. L'épuisement professionnel, la COVID-19, le racisme anti-Noirs et la misogynie (entre autres) sont au centre des combats quotidiens que nous menons et ce n'est pas facile. Alors que nous travaillons à la guérison et à une meilleure compréhension de nos besoins en tant que femmes ACN, je nous encourage tous à réfléchir à la façon dont cette citation s'inscrit dans nos propres vies et histoires.

Vous souhaitez en savoir plus ?

Vous pouvez en apprendre davantage sur la façon dont le projet BSC aborde ces questions dans un épisode de Pozcast avec la fondatrice du projet collaboratif, Lori Chambers. L'équipe collaborative partage actuellement les résultats de son étude et organise pour bientôt des représentations passionnantes, alors restez à l'écoute en suivant BSC sur Twitter, Instagram et Facebook.

Et, restez à l'écoute de L'Effet Positif pour découvrir le prochain article de cette série.


Ce billet de blogue a été rédigé par Teresa Bennett, une étudiante-chercheuse associée à REACH Nexus. Teresa est titulaire d'un baccalauréat spécialisé (Hons. BSc) en sciences (sciences de la santé) de l'Université Wilfrid Laurier.

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