Andrew
Quand on a la chance à ses côtés
Sauvé de justesse!
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Note sur le contenu: cette histoire contient des références au suicide.

Mon partenaire (maintenant décédé) et moi juste avant de quitter Berkeley pour Santa Fe.

J'ai été testé assez tard, vers 1991. J'étais dans une relation monogame depuis août 1980 et j'étais en bonne santé. Un ami qui se trouvait dans une situation similaire a été testé dans le cadre d'une exigence professionnelle et le résultat était positif. Cela a poussé toutes nos connaissances à se rendre sur un site de dépistage. Mon partenaire était négatif et moi positif.

Après un mois de tourments et de doutes, j'ai continué ma vie. J'étais en bonne santé et il n'y avait rien que je puisse faire. Fatigués des embouteillages et de la promiscuité, mon partenaire et moi avons alors quitté notre vie agréable à Berkeley, en Californie pour nous installer à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, capitale historique de l'État mais aussi capitale artistique et culturelle dynamique. Cette décision avait, à l'époque, choqué tous nos amis et notre famille.

Située à l'extrémité sud des Rocheuses, dans un désert situé à 2500 m d'altitude, et surplombant la vallée du Rio Grande, Santa Fe est entourée de millions d'acres de forêt nationale et bénéficie d'un climat agréable avec 330 jours de soleil par an.

Trouver une nouvelle vie à Santa Fe

Là-bas, les possibilités d'emploi étaient limitées. Le gouvernement de l'État était un gros employeur mais les emplois étaient rares pour les personnes qui, comme nous, n'appartenaient pas à la communauté hispanique. Et ce, même si je parlais couramment l'espagnol. Les autres options étaient de vivre de nos placements (que nous n'avions pas) ou de créer une entreprise. Santa Fe est une destination qui attirent les voyageurs. Alors, sans aucun intérêt préalable, nous avons décidé de construire un petit hôtel. J'avais une formation d'architecte, j'ai donc entrepris de concevoir notre petite auberge. Et mon partenaire, qui était un boulanger reconnu, s'est donc chargé de la nourriture et de l'organisation.

Lors de notre saison inaugurale, nous avons été submergés par un grand nombre de recommandations venant d'autres établissements et nous en avons bien profité. Au début de notre deuxième saison, Santa Fe a été désignée par un panel international d'auteurs de voyage comme la première destination touristique au monde, devant les éternelles vedettes que sont Paris, San Francisco et Vancouver.

J'étais loin de me douter que ce geste allait littéralement me sauver la vie.

L'évolution de mon diagnostic

Peu de temps après notre installation, un médecin de famille local très respecté a vendu son cabinet privé et a ouvert une petite clinique VIH. J'en ai été l'un des premiers clients et j'y ai travaillé bénévolement à temps partiel pour répondre au téléphone et accueillir les clients. Je n'ai jamais développé aucune des infections opportunistes caractéristiques associées au VIH, mais j'ai fini par recevoir un diagnostic de sida lorsque mes lymphocytes T sont passés en dessous de 200.

Après deux ans sans problèmes de santé dramatiques, j'ai fini par perdre du poids et de l'énergie, et j'ai passé les six premiers mois de 1995 au lit, affaibli. Il n'y avait aucun traitement à cette époque. Je glissais vers une mort imminente lorsque, soudainement, en août 1995, on a annoncé un essai clinique pour 1400 personnes avec le médicament Crixivan, qui semblait arrêter le virus en laboratoire.

In extremis

Je faisais partie des quelque 40 000 candidats sélectionnés et j'ai eu l'immense chance d'obtenir la seule place destinée au Nouveau-Mexique. Dans notre petite clinique, les formalités administratives ont été remplies rapidement et j'ai reçu ma première dose le jour même où elle est devenue disponible: le 1er novembre 1995. À ce moment-là, j'étais extrêmement faible, il ne me restait qu'une poignée de lymphocytes T et ma charge virale dépassait 1 million de copies. J'étais à quelques jours de la mort.

Ma mère et moi, printemps/été 1980. Je n'étais pas au courant de mon infection par le VIH.

À l'époque, nous pensions que le médicament était efficace au bout d'un mois. J'ai appris par la suite qu'il avait en fait vaincu le virus dès ma première dose! Si nous étions restés à Berkeley, en Californie, la clinique où j'aurais pu recevoir le traitement gérait une clientèle très importante. Et même si j'avais obtenu une place dans l'essai, les formalités administratives auraient très probablement été plus longues et j'aurais été mort avant l'arrivée de la première dose. Tel a été le sort de mon ami dont le résultat positif inattendu avait entraîné ma propre démarche de dépistage. Bien que lui aussi ait eu la chance de pouvoir participer à l'essai, il n'a reçu sa première dose qu'après 1996, soit deux mois après moi, en raison du retard pris dans les formalités administratives. Un mois plus tard, il était malheureusement décédé.

Le déménagement à Santa Fe, qui m'a connecté à une petite clinique, m'a sauvé la vie! Mon merveilleux docteur était à la fois mon médecin et mon ami. Après quatre ans passés à voir mourir ses patients, je suis devenu le premier à m'en sortir, et je suis devenu la mascotte de la clinique. J'ai lentement retrouvé mes forces et suis retourné au travail. Victimes d'effets secondaires jusqu'alors inconnus du Crixivan, je suis alors passé au Sustiva dès qu'il a été disponible.

Trouver un traitement qui fonctionne pour moi et recommencer ma vie en Colombie-Britannique

Six mois plus tard, j'ai été victime de l'un des effets secondaires jusqu'alors inconnus de ce second traitement destiné à me sauver: une dépression suicidaire telle un trou noir. Sans le savoir, j'entretenais cette dépression mortifère en prenant mes médicaments deux fois par jour. Les antidépresseurs et la thérapie par la parole étaient inefficaces et ce n'est que grâce à mon incapacité à me tuer lors de deux tentatives de suicide que j'ai survécu. Huit mois plus tard, un psychiatre pharmacologue a pris connaissance des effets secondaires potentiels liés aux enjeux de santé mentale et a retiré le Sustiva de mon traitement. Ma vie a lentement repris son cours normal.

Aussi brusquement que mon ex-partenaire et moi avions déménagé à Santa Fe en 1991, j'ai déménagé à Victoria, en Colombie-Britannique, le 1er novembre 2005. Je suis d'abord devenu bénévole, puis membre du conseil d'administration et le visage de la séropositivité au sein d'un organisme de lutte contre le sida (OLS, ASO en anglais) régional, anciennement appelé AIDS Vancouver Island (AVI). Malheureusement, au moment où je commençais ma carrière de bénévole en 2007, la stigmatisation du VIH était très présente sur l'Île de Vancouver.

Mais par chance, ma vie était sauve et j'étais heureux d'avoir échappé de justesse à une mort certaine. J'ai, à partir de là, pris la parole fréquemment et avec vigueur lors d'événements publics, à la télévision, à la radio et dans des interviews dans la presse écrite. Mon histoire dramatique de survie alors que j'étais condamné à une mort certaine était intéressante et, en m'exprimant, j'ai contribué à la lente expulsion de la stigmatisation liée au VIH dans notre région. C'était un excellent premier "emploi" pour un immigrant tardif et maintenant fier citoyen du Canada.

Prendre ma place en tant que fier défenseur de la lutte contre la stigmatisation liée au VIH

Au fil des ans, j'ai continué à jouer un rôle dans le bénévolat et la défense des droits. J'ai pu faire entendre la voix des personnes que j'ai rencontrées - à travers les bureaux de réception ou en marchant dans la rue - sur des podiums qui les accueillent rarement. Je fais actuellement partie des équipes de l'enquête sur l'indice de stigmatisation du VIH en Colombie-Britannique et au niveau national - une étude de recherche communautaire visant à recueillir des données sur l'impact de la stigmatisation et de la discrimination sur la vie des personnes vivant avec le VIH. Je suis également représentant de la communauté séropositive au sein du comité directeur consultatif STOP HIV/AIDS de Island Health.

Bien que mon histoire illustre clairement l'avènement des médicaments anti-VIH qui sauvent des vies, la stigmatisation liée au VIH continue de nuire considérablement à la santé mentale et physique des gens, ainsi qu'aux liens sociaux avec les autres. Cette triste réalité m'oblige à entreprendre la prochaine étape de mon parcours : mettre fin à la stigmatisation liée au VIH et offrir plus équitablement de la compassion à mes concitoyens canadiens.

Plus tôt cette année, Andrew a reçu la prestigieuse Medal of Good Citizenship (médaille du civisme) de la Colombie-Britannique, qui souligne ses années de contributions exceptionnelles et son engagement à aider les autres dans sa communauté.